Le Code des droits de succession précise que ce sont les héritiers (ou légataires) qui doivent estimer les biens composant l'actif de la succession. Ils doivent reprendre dans la déclaration la "valeur vénale" des différents biens à la date du décès. Bien entendu, en vérifiant ces informations, le fisc contrôlera si la déclaration est bien complète, et si les estimations sont correctes.
Mais, qu'est-ce que la valeur vénale? Il s'agit de la valeur marchande des biens, c'est à dire le montant du prix que les héritiers pourraient raisonnablement obtenir s'ils vendaient l'immeuble dans des conditions normales. Le code ne reprend cependant pas la manière dont cette valeur vénale doit être déterminée, et les héritiers doivent prendre la responsabilité de cette estimation.
Les receveurs de l'enregistrement vérifient les estimations, en se basant principalement sur des points de comparaison: ils déterminent habituellement la valeur des immeubles en analysant les prix de vente d'autres biens de même nature.
Ne pas sous-estimer ni surestimer les immeubles
La question de l'estimation est très importante : si les héritiers sous-estiment l'immeuble, le receveur de l'enregistrement pourrait contester la valeur reprise dans la déclaration; dans ce cas, il réclamera aux héritiers des droits de succession complémentaires, calculés sur base de la différence entre la valeur déclarée et la valeur qu'il aura déterminée lui-même ; il réclamera également une amende. Si la différence est importante, l'amende sera proportionnellement plus importante. Si l'immeuble est vendu après le dépôt de la déclaration de succession à une valeur supérieure au montant déclaré, l'administration réclamera le droit supérieur et l'amende.
Par contre, si les héritiers, craignant ces droits complémentaires et cette amende, déclarent un montant supérieur à la valeur que l'administration aurait acceptée, ils ne pourront pas récupérer les droits payés en trop. De même, si l'immeuble est vendu à une valeur inférieure à la valeur déclarée, il n'y aura pas de restitution de droit.
Bien entendu, les héritiers ont le droit de contester l'avis de l'administration : ils peuvent se défendre et faire valoir leur point de vue. L'administration se base souvent sur un dossier écrit, mais ne connaît pas toujours les caractéristiques propres de l'immeuble : la maison est parfois en très mauvais état, alors que la façade extérieure laisse supposer le contraire. Rien ne vaut une visite sur place : les héritiers peuvent toujours inviter le receveur à venir visiter l'immeuble. S'il est en très mauvais état, le receveur pourra le constater et éventuellement revoir sa position : il pourra soit abandonner totalement, soit proposer une transaction sur base d'une valeur moyenne.
Toutefois, si le fisc et les héritiers restent sur leurs positions, il faudra recourir à l'expertise de contrôle : comme en matière de droits d'enregistrement pour les ventes d'immeubles, le fisc réclamera les droits complémentaires, les amendes pleines et les intérêts si l'expert désigné constate que la valeur réelle des biens est supérieure au montant déclaré. Dans ce cas, les frais de l'expertise de contrôle seront également à charge des héritiers. Il vaut souvent mieux transiger avec le receveur que courir ces risques.
Pour éviter les problèmes liés à une mauvaise estimation, les héritiers demandent souvent l'avis de leur notaire ou chargent un expert de déterminer cette valeur vénale. Leurs conclusions ne lient cependant pas le fisc qui peut faire valoir d'autres arguments.
L'expertise préalable
Il existe cependant un moyen d'éviter toute difficulté: le recours à l'expertise préalable. Avant le dépôt de la déclaration de succession, les héritiers et le receveur de l'enregistrement nomment conjointement un expert qui se chargera de l'estimation des immeubles. Ses conclusions lieront définitivement les deux parties, et les héritiers devront reprendre l'estimation de l'expert dans leur déclaration. Si l'immeuble est vendu ultérieurement à un prix plus élevé, il n'y aura pas de droit supplémentaire à devoir supporter; par contre, si le prix obtenu est inférieur, les héritiers auront payé des droits sur des sommes qu'ils n'auront pas reçues.
Cette solution présente l'avantage d'avoir une valeur qui s'impose à tous, mais entraîne des frais d'expertise qui, dans tous les cas, seront mis à charge de la succession. Si les héritiers prévoient de devoir payer des droits élevés, ils n'hésiteront pas à recourir à cette procédure; par contre, si la succession est peu ou pas taxable, cette procédure présente moins d'intérêt.