Lanceurs d’alerte
La loi communément appelée la « loi lanceurs d’alertes » est la loi du 28 novembre 2022 sur la « protection des personnes qui signalent des violations au droit de l’Union ou au droit national constatées au sein d’une entité juridique du secteur privé ». Cette loi est la transposition en droit belge de la directive européenne (UE) 2019/1937 du 23 octobre 2019. L’objectif premier est d’offrir un niveau de protection élevé aux personnes, qu’on désigne sous le nom de lanceurs d’alerte, qui signalent des violations de la législation UE au sein d’une entité juridique du secteur privé dans un grand nombre de domaines, parmi lesquels la prévention du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme.
On entend par protection les mesures prises pour contrer d’éventuelles représailles, menaces et tentatives de représailles à l’encontre du lanceur d’alertes, des membres de sa famille ou de ses collègues.
1. Qui peut effectuer un signalement ?
Les personnes suivantes qui ont obtenu des informations sur des violations dans un contexte professionnel dans ou en rapport avec une étude notariale peuvent signaler celles-ci :
- salariés qui, dans le cadre de leur activité professionnelle, découvrent une violation dans une étude notariale ;
- collaborateurs indépendants ;
- actionnaires, membres de l’organe d’administration, de direction ou de surveillance d’une société professionnelle notariale, y compris des membres non exécutifs ;
- volontaires et stagiaires, rémunérés ou non rémunérés ;
- contractants, sous-traitants et fournisseurs ;
- anciens salariés ;
- futurs salariés (pour des informations obtenues durant le processus de recrutement ou d’autres négociations précontractuelles) ;
- facilitateurs.
Le signalement peut être effectué de manière totalement anonyme. Dans ce cas, même la Chambre nationale des notaires ne connaît pas l'identité de l’auteur du signalement et ne peut donc pas l'informer de l'(ir)recevabilité du signalement, ni lui demander des informations ou éclaircissements complémentaires.
2. Dans quels cas peut-on faire un signalement à la Chambre nationale des notaires ?
La Chambre nationale des notaires est l’autorité compétente pour tout signalement concernant la prévention du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme.
Les personnes qui ont obtenu des informations sur des violations dans un contexte professionnel et qui concernent la prévention du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme dans ou en rapport avec une étude notariale peuvent signaler celles-ci à la Cellule Lanceurs d’alerte de la Chambre nationale des notaires.
La Cellule Lanceurs d’alerte ne sert pas à déposer une plainte en tant que client ou à signaler un conflit personnel avec l’employeur ou un confrère.
3. Qui est protégé ?
Le lanceur d’alerte bénéficie d’une protection, mais également les personnes qui interviennent comme facilitateurs (ses collègues ou des membres de sa famille par exemple).
Est considéré comme facilitateur, toute personne physique qui aide un auteur de signalement au cours du processus de signalement et dont il convient que l’aide soit confidentielle.
4. Comment signaler une présomption de violation ?
Il existe plusieurs possibilités pour signaler une violation.
Un signalement doit porter sur des faits qui se sont déroulés dans une organisation privée et dont il a été pris connaissance dans un contexte professionnel. La loi fait une distinction entre signalements internes et externes.
- Un signalement interne est un signalement au sein de l'entreprise.
- Un signalement externe est la communication orale ou écrite d'informations sur des violations au coordinateur fédéral ou aux autorités compétentes.
Tout signalement transmis à la Chambre nationale des notaires entre dans la catégorie des signalements externes.
5. Comment introduire un signalement auprès de la Chambre nationale des notaires ?
Il existe plusieurs façons de transmettre un signalement :
- e-mail : whistleblowing@cnknot.be ;
- ligne téléphonique : +32 (0)2 50 64 643 (les conversations téléphoniques ne sont pas enregistrées) ;
- signalement écrit sur support papier : à adresser à la Chambre nationale des notaires, Cellule Lanceurs d’alerte, confidentiel - rue de la Montagne 30-32 à 1000 Bruxelles ;
- rencontre physique : sur rendez-vous qui peut être pris par e-mail whistleblowing@cnknot.be).
Le signalement par le lanceur d’alerte doit permettre à la Chambre nationale des notaires d’enquêter sur les faits signalés.
L’auteur de signalement, y compris l’auteur de signalement anonyme, fournit à la Chambre nationale au minimum les informations suivantes :
- sa qualité;
- les faits établissant la violation ;
- la nature de la violation ;
- le nom et, le cas échéant, la fonction de la personne concernée ;
- la période à laquelle la violation a eu lieu.
Si l’auteur de signalement les a en sa possession, toute preuve de la violation et tout autre élément lui paraissant pertinent peuvent être transmis.
Le signalement est conservé dans un système confidentiel et sécurisé, dont l’accès est limité.
6. Qui veille à la protection de l’auteur du signalement ?
Le coordinateur fédéral veille à la protection des personnes concernées.
Tout lanceur d’alerte qui s’estime victime ou est menacé de représailles, peut introduire une plainte motivée auprès du coordinateur fédéral, qui lance une procédure de protection extrajudiciaire. Plus d'informations : Protection contre des mesures de représailles
7. Quelles conditions doivent être remplies pour bénéficier de la protection ?
Pour bénéficier de la protection prévue par la loi, le lanceur d’alerte doit satisfaire aux conditions suivantes :
- avoir agi de bonne foi,
- avoir des motifs raisonnables de croire que les informations communiquées au moment du signalement étaient véridiques,
- avoir suivi la procédure de signalement prévue par la loi.
Le lanceur d’alerte ne bénéficie pas d’une protection si le signalement est basé sur de fausses informations ou sur des informations obtenues suite à une infraction.
Les lanceurs d’alertes qui ont signalé des informations de manière anonyme ne peuvent de facto pas faire l’objet d’une protection.
8. Quid en cas de représailles ?
Sans préjudice de tout autre recours administratif ou extrajudiciaire, tout auteur de signalement a le droit d’introduire un recours auprès du tribunal du travail en cas de représailles.
L’Institut fédéral pour la protection et la promotion des droits humains veille à ce que les mesures d'accompagnement soient appliquées tant pour les signalements internes que pour les signalements ou divulgations externes. Il constitue le point central d’information pour la protection des lanceurs d’alerte.
9. De quelle protection bénéficiez-vous en tant qu’auteur de signalement ?
La loi prévoit une protection pour les personnes qui signalent de bonne foi à la Chambre nationale des notaires une violation de la législation sur la prévention du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme dont elle contrôle le respect. L’auteur de signalement ne perd pas le bénéfice de la protection au seul motif que le signalement effectué de bonne foi s’est avéré inexact ou infondé. Cela vaut également pour les personnes qui ont procédé à un signalement de manière anonyme, mais qui ont été identifiées par la suite et deviennent victime de représailles. Les facilitateurs et les tiers qui sont en lien avec les auteurs de signalement bénéficient de la même protection s’ils avaient des motifs fondés de croire que l’auteur de signalement tombait sous le champ d’application de protection de la loi.
Les personnes qui signalent de bonne foi une telle violation peuvent communiquer à la Chambre nationale des notaires des informations qui sont normalement confidentielles, pour autant qu’elles aient des motifs raisonnables de croire que le signalement de telles informations est nécessaire pour révéler une violation de la législation sur la prévention du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme. Un tel signalement ne peut donner lieu à aucune action civile, pénale ou disciplinaire ni à une sanction professionnelle. L’auteur de signalement et les autres personnes protégées ne peuvent encourir aucune responsabilité, de quelque sorte que ce soit, dans des procédures judiciaires suite à de tels signalements de violations. En outre les personnes qui signalent de telles informations ne peuvent encourir aucune responsabilité en ce qui concerne l’obtention des informations qui sont signalées, ou l’accès à ces informations, à moins que cette obtention ou cet accès constituaient un fait punissable en soi.
Toute forme de représailles contre l’auteur de signalement et les autres personnes protégées, en ce compris des menaces et tentatives de représailles, est interdite (comme un licenciement, une diminution de salaire, un refus de promotion, une coercition, un traitement inégal, du harcèlement, un refus de formation…). L’auteur de signalement et les autres personnes protégées qui s’estiment victimes de représailles peuvent introduire une plainte auprès du Médiateur fédéral et peuvent s’adresser au tribunal. La charge de la preuve incombe à l’entité concernée qui a pris la mesure préjudiciable. L’auteur de signalement peut demander à la Chambre nationale des notaires de confirmer son statut de lanceur d’alerte, y compris la date du signalement, auprès de toute autorité administrative ou judiciaire.
Les auteurs de signalement et les autres personnes protégées bénéficient en outre d’une série de mesures de soutien:
- des conseils indépendants et gratuits sur les droits de l’auteur de signalement et les droits de la personne accusée d’une violation dans le signalement ;
- des conseils techniques à l’égard de toute autorité concernée par la protection de l’auteur de signalement ;
- une assistance juridique dans le cadre de procédures transfrontalières ;
- un soutien technique, psychologique, médiatique et social ;
- et une assistance financière pour les auteurs de signalement dans le cadre de procédures judiciaires.
L’Institut fédéral pour la protection et la promotion des droits humains fournit des conseils indépendants et gratuits, une assistance juridique dans le cadre de procédures transfrontalières et une assistance financière pour les auteurs de signalement dans le cadre de procédures judiciaires.
10. Quelles sont les procédures qui s’appliquent aux signalements ?
Les auteurs de signalement peuvent signaler une violation à la Chambre nationale des notaires, soit après avoir effectué un signalement par le biais des canaux de signalement interne de l’entité concernée, soit en adressant un signalement directement à la Chambre nationale des notaires.
Les signalements sont traités au sein de la Chambre nationale des notaires par des membres du personnel spécialisés qui sont formés à cette fin. Ces derniers entretiennent des contacts avec l’auteur de signalement si celui-ci a laissé des données de contact.
Les signalements reçus sont conservés au sein d’un système confidentiel et sécurisé. L’accès au système est soumis à des limitations qui font que les données conservées ne sont accessibles qu’aux personnes au sein de la Chambre nationale des notaires, qui ont besoin d’accéder à ces données pour accomplir leurs tâches professionnelles.
La Chambre nationale des notaires envoie sans délai, et en tout cas dans les 7 jours calendrier suivant réception du signalement, une confirmation de réception via les données de contact qui ont été fournies par l’auteur du signalement, à moins que l’auteur du signalement concerné s’y soit expressément opposé ou que les membres du personnel spécialisés soient d’avis, pour des motifs raisonnables, que cela nuirait à la protection de l’identité de l’auteur du signalement. Cette confirmation de réception prouve uniquement que l’auteur de signalement concerné a signalé des informations via la Cellule Lanceurs d’alerte ou par écrit sur support papier et à quel moment il a transmis ces informations. En revanche, cette confirmation ne prouve pas qu’il s’agit d’un signalement de violation bénéficiant de la protection prévue par la loi.
Lorsque la Chambre nationale des notaires reçoit un signalement externe, le membre du personnel spécialisé évalue si le signalement contient des informations sur une violation.
Le membre du personnel spécialisé vérifie si d’autres autorités compétentes sont concernées par le signalement. Si nécessaire, elles sont informées via le coordinateur fédéral et une coordination est mise en place avec elles.
La Chambre nationale des notaires assure un suivi diligent des signalements. La Chambre nationale des notaires vérifie l’exactitude des affirmations formulées dans le signalement et, le cas échéant, traite la violation, par exemple en imposant des mesures ou des sanctions. Elle peut, après avoir dûment évalué le signalement, également décider de ne pas y réserver d’autre suite que la clôture de la procédure. Tel peut par exemple être le cas si une violation signalée est manifestement de peu d’importance ou s’il s’agit d’un signalement répété qui ne contient pas de nouvelles informations significatives par rapport à un signalement antérieur à propos duquel les procédures concernées ont été clôturées. Lorsqu’elle est confrontée à un grand nombre de signalements, la Chambre nationale des notaires peut également accorder la priorité au traitement de violations graves ou de violations de dispositions essentielles dont elle contrôle le respect.
S’il est estimé que le signalement est irrecevable, la personne concernée en est informée par écrit dans les 30 jours suivant réception du signalement, sauf en cas de signalement anonyme.
11. Retour d’informations
En raison des restrictions légales en matière de secret professionnel de la Chambre nationale des notaires, l’auteur de signalement ne recevra un retour d’informations qu’à titre très exceptionnel. La Chambre nationale des notaires ne peut notamment pas fournir à l’auteur de signalement un retour d’informations intermédiaire sur le suivi réservé au signalement. Elle ne peut fournir un retour d’informations sur le résultat final des enquêtes menées suite au signalement que si celui-ci entraîne des mesures ou des sanctions publiées nominativement. Dans ce cas, la Chambre nationale des notaires renverra l’auteur de signalement à la publication de cette mesure ou de cette sanction.
12. Contacts utiles
Le rôle du coordinateur fédéral (le Médiateur fédéral) est de faciliter la procédure de signalement pour les lanceurs d’alerte. Le coordinateur fédéral est en charge de recevoir les signalements externes de violations, d’examiner leur recevabilité et l’existence d’une présomption raisonnable que la violation signalée a eu lieu et, dans ce cas, de transmettre le signalement à l'autorité compétente pour qu'elle lance une enquête.
L’Institut fédéral pour la protection et la promotion des droits humains s'efforce de créer une société où les droits humains de toutes les personnes sont respectés de manière égale.
13. Traitement des données à caractère personnel
Les données à caractère personnel qui sont transmises à la Chambre nationale via un signalement sont traitées de la manière décrite dans sa politique de confidentialité.