Olivier Devresse : "Le PEB est devenu très central dans l'octroi d'un crédit"

24 octobre 2024

Olivier Devresse répond à nos questions sur l'obtention d'un crédit hypothécaire.

Obtenir un crédit, c'est l'étape presque indispensable quand on se lance dans un projet immobilier. Mais le sujet est complexe. Quel taux ? Quel crédit ? Quel risque ? Nous avons posé toutes nos questions à Olivier Devresse, conseiller juridique chez Stater.

Vrai ou faux, est-ce devenu vraiment plus compliqué d'obtenir un prêt ?

Oui, effectivement. Ces derniers temps, suite à la hausse des taux et à l’inflation, c'est devenu effectivement beaucoup plus difficile pour des jeunes acquéreurs de devenir propriétaires et de contracter un crédit hypothécaire.

Mon conseil serait, tout d’abord, de bien connaître son dossier. Avoir un bon plan financier et savoir quelle est la partie de ses revenus qu'on va pouvoir allouer au remboursement de l'emprunt hypothécaire. Composer un dossier qui soit solide avec des fiches de salaire, avec une analyse complète de ses dépenses actuelles et de ses revenus, et examiner toutes les possibilités qu'on peut trouver en termes de garanties pour rendre son dossier plus attrayant pour le prêteur.

Examinez aussi les possibilités d'obtenir des aides de vos proches parce que c'est la quotité empruntée qui va déterminer le taux. Au plus les candidats emprunteurs ont de fonds propres, au plus il sera possible de rabaisser cette quantité empruntée et avoir un meilleur taux.

Est-ce que le PEB peut influencer l’octroi d’un crédit ?

Oui, tout à fait. Le PEB est devenu très central. Un PEB favorable est synonyme de moins de charges à payer en termes de factures énergétiques. Cela est intéressant aussi pour les bailleurs : qui dit meilleur PEB, dit meilleur loyer, et donc meilleur rendement. C'est un cercle vertueux.

Lorsqu’on se lance dans un projet de rénovation, d'emblée la maison qu'on achète peut avoir un moins bon PEB. Mais il existe tout un arsenal de réductions qui sont octroyées aux candidats acquéreurs, s'ils arrivent, après transformation et rénovation de leur habitation, à un certain niveau de PEB. Il peut donc être intéressant de profiter de ces possibilités-là.

Je vais me lancer dans un achat. Quels sont les types de crédits hypothécaires auxquels je peux avoir droit ?

Tout d'abord ? il faut distinguer les achats « simples » des achats avec transformation.

Lorsque l’on parle d’un achat, il s'agit d'une mise à disposition immédiate du montant emprunté. Cela va déjà déterminer la forme et les modalités du crédit.

Si vous comptez faire un achat avec une transformation, vous allez vous trouver face à une autre forme de crédit où on va mettre à disposition les sommes de façon étalée pour financer les travaux. Sur ce point, il faut être bien attentif au délai dans lequel vous allez devoir réaliser ces travaux. Il faut aussi avoir un plan de tranche qui soit clairement établi en collaboration avec votre architecte et votre entrepreneur. Et puis, il faut aussi se poser des questions : quelle est l'indemnité de mise à disposition qui est réclamée par la banque ? À partir de quand cette indemnité de mise à disposition sera-t-elle réclamée ? Pour un peu vulgariser l'indemnité de mise à disposition, c'est un intérêt que la banque va mettre à charge de l'emprunteur pour les sommes qu'elle a mises à disposition dans le cadre du crédit, mais que l'emprunteur n'aurait pas prélevé. Vous avez donc tout intérêt, quand vous faites de la rénovation avec de la transformation, à ne pas dépasser trop les délais et à prélever votre crédit le plus rapidement possible pour être moins pénalisé par rapport à cette indemnité de mise à disposition. C'est un univers qui est assez complexe, renseignez-vous bien.

Il existe également des sociétés de crédit social comme le Fonds du logement, VLAMS, la Société Wallonne du Crédit Social,... On vous y propose, à certaines conditions, des possibilités différentes, des alternatives par rapport au crédit classique, mais il y a aussi des contraintes différentes.

Taux fixes ou taux variables ? Que conseillez-vous ?

Des études démontrent qu'en Belgique, quasiment 90% des crédits se font à taux fixe. Les gens jouent la sécurité. Avant de se lancer dans un taux variable, il faut partir d'un scénario catastrophe en tenant compte d'une variabilité maximale.

Chez nous, le taux variable au niveau du crédit hypothécaire est bien encadré : il y a des garde-fous. Par exemple : il existe des crédits dans lesquels le taux variable est « capé ». Il s’agit d’un prêt à taux variable plafonné, qui permet de limiter une éventuelle hausse du taux du crédit. Lors de la signature du contrat de crédit, une limite est mise en place pour définir le taux d'intérêt. Ces prêts à taux variable capé sont moins risqués que les autres prêts à taux variable et vous savez à l’avance quel est votre risque maximum.

Il existe différents sites, comme Wikifin, qui proposent des simulations pour estimer, en fonction de votre goût du risque, si vous choisissez le taux variable ou le taux fixe.

Et tant qu'on est dans les taux, c’est quoi le TAEG ?

Le TAEG, est un concept qui a été au départ imposé au niveau européen afin de permettre une comparaison de différents crédits pour le consommateur. Il s’agit de la traduction dans le taux d'intérêt de toute une série de frais annexes au crédit comme la prime d'assurance incendie, la prime liée à l'assurance solde restant dû, les frais de dossier, les frais d’acte notarié (attention, les honoraires du notaire ne sont pas pris en considération dans ce calcul), ... Le TAEG transforme tous ses coûts en un taux d'intérêt pour que le consommateur puisse faire un peu de shopping et comparer les offres de différents prêteurs.

Je ne suis pas très fan du TAEG, parce que déjà, c'est très peu lisible comme information pour le consommateur et, deuxième point, ça induit des comportements qui ne sont pas toujours des comportements de « bon père de famille ».

Certaines banques, pour être compétitives sur les TAEG, pourraient être tentées de remplacer une hypothèque par un mandat hypothécaire. Donc, c’est-à-dire qu'on aurait moins de frais de sûreté, donc un TAEG moins important. Mais au premier pas de travers, paf, on convertit le mandat. Le consommateur se retrouve avec une grosse facture au niveau de l'inscription hypothécaire…

Il y a quelques années, quand les taux étaient très bas, les choses étaient relativement simples, tout le monde s'en moquait un peu. Mais aujourd'hui, la comparaison est d'autant plus importante. Et il est vrai que parfois une banque va vous donner un taux qui est plus bas, mais en réalité va se récupérer sur l'assurance-vie ou sur l'assurance incendie qu'elle va vous imposer de prendre.

Et du coup, en tant que consommateur, il est très important de s'informer et d’oser poser ses questions. Il vaut mieux poser une bête question que de se retrouver avec une mauvaise surprise une fois le crédit signé.

Comment voyez-vous évoluer le marché dans les années à venir ?

Je ne suis pas économiste et je n'ai pas de boule de cristal, mais on est énormément dépendants des taux pratiqués par les banques centrales qui elles-mêmes font en fonction de l’inflation. D’autres facteurs peuvent aussi avoir un impact comme les missions de durabilité qui poussent les États à encourager les crédits à la rénovation énergétique. Ce seront à mon avis ces formules de crédit qui vont connaître un assez beau succès dans les prochaines années.

Au cours des dernières années, le secteur des prêteurs s’est aussi adapté aux besoins des primo-acquéreurs. Il n’est pas rare aujourd’hui de voir des formules de crédit hypothécaire sur 22 ans, 23 ans, 25 ans, 30 ans. Alors que nos parents empruntaient généralement sur 20 ans. C’est justement pour faire face à cette hausse des taux et rendre le crédit plus abordable que les prêteurs ont accepté un allongement de la durée des crédits.

Nos conseils si vous pensez à souscrire un crédit hypothécaire :

  • Avant de vous engager, renseignez-vous auprès de différentes banques et de compagnies d’assurances sur leurs offres. Faites jouer la concurrence !
  • Prenez le temps de lire les documents que vous recevez ! Ne signez jamais un document que vous ne comprenez pas ! N’hésitez pas à poser vos questions !

Retrouvez les précieux conseils pour naviguer sereinement dans le processus de demande de prêt d'Olivier Devresse et du notaire Sylvain Bavier dans notre podcast Notaires&CO sur Spotify.

Source: Fednot